Kuala Trg., 24 mars 2009

Mauvaise surprise au réveil : la pluie ne s’est pas arrêtée. Elle n’est pas très forte, mais suffisamment pour rendre la prise de vue impossible, surtout qu’aujourd’hui nous devions être à l’extérieur.
Nous nous sommes quand même rendus au rendez-vous de 8h00 avec le MTIB, histoire de repérer les lieux pour les prochains jours, en espérant que le soleil se montrera.

A 9h30, nous avons décidé avec Sanjit de faire un tour au musée, supposé abriter de nombreuses sculptures en chengal. Je n’étais quand même pas très motivée parce qu’entre la fatigue accumulée et la pluie, déambuler dans un musée m’enchantait autant que manger du durian.
Heureusement, malgré les indications, nous nous sommes perdus une fois de plus. Et en passant par des petits chemins imprévus, nous avons repéré une magnifique maison en bois. Nous avons donc tenté notre chance et sonné à la porte pour rencontrer les heureux propriétaires d’une telle demeure.
La sœur du propriétaire nous a ouvert sa porte et invités à entrer. J’ai alors expliqué que je faisais une recherche sur le chengal et que j’admirais beaucoup sa maison. Nor Hayati, notre hôtesse, a confirmé qu’elle était en chengal, et nous a expliqué qu’elle était récente puisque la maison a été construite une dizaine d’années auparavant. Nous avons discuté assis sous le porche, un lieu très important de la culture malaise, puis elle nous a invités à entrer. Quel magnifique intérieur : poutres aparentes en chengal, un espace incroyable, un mobilier soigneusement disposé, et tout le confort moderne ! Nous avons été accueillis avec du thé, des fruits, des fruits secs, et puis les fameuses chips de keropok que j’ai laissé Sanjit manger… Le frère de Nor, le propriétaire, a fait construire la maison pour sa mère, alors que lui habite KL. Mais la maman ne voulait pas quitter sa vieille maison pleine de souvenirs. Ils ont trouvé un compromis : la belle demeure a été construite, et la vieille maison a été démontée et remontée au fond du jardin. C’est tout de même bien pratique ce système de construction malaisien.

Nor est tellement passionnée par le chengal qu’elle nous a proposé d’attendre son mari, puis de nous guider pour aller voir les belles maisons du voisinage. Son mari, un homme jovial et tout aussi charmant, a immédiatement adhéré au programme. "A Rome, fais comme les Romains", dit le dicton : je n’ai donc pas serré la main du monsieur pour lui dire bonjour, puisqu’en musulmane convaincue Nor n’avait pas serré la main de Sanjit pour ne pas toucher un homme étranger. Pour ne pas paraître impolie, j’ai donc salué de loin tous les hommes que nous avons rencontrés lors des visites suivantes. Je n’ai tout de même pas été à l’aise avec cette coutume, une poignée de main étant pour moi un geste chaleureux n’ayant rien de "sale", mais je tenais à respecter les croyances de mes amis du jour.

Le temps était toujours mauvais, mais nous avons pu voir une première maison, vieille de plus de 100 ans, puis une deuxième, que nous avons visitée, puis une troisième, construite sur le modèle d’un ancien palais.
Enfin, le couple ayant vraiment envie de nous faire partager les trésors architecturaux de la région, nous avons été voir une maison très curieuse. Le propriétaire a acheté il y a quarante ans la maison "salon" d’un sultan, qui souhaitait un palais plus moderne. Les palais étaient alors composés de plusieurs maisons en bois de chengal bien sûr : une pour les invités, une pour dormir, une pour manger, une pour recevoir, une pour attendre son audience, etc. Donc le propriétaire de la fameuse maison a acheté "le salon" pour seulement 5 000 RM (soit un peu plus de 1 000 euros), puis il a construit un rez de chaussée en brique suivant exactement le même plan, à la place des pilotis de l’ancien temps. Il a juste posé le salon du sultan sur cette base en brique, et consolidé le tout. L’ensemble est harmonieux de l’extérieur, et vraiment très curieux de l’intérieur, tout en étant très fonctionnel avec beaucoup d’espace.

Pour une matinée surprise, c’était plutôt intéressant ! La mauvaise surprise par contre, c’est la confirmation que je ne pourrais pas voir le chengal record, celui qui fait 17 mètres de circonférence et qui a 1 300 ans. Les intempéries ont provoqué des glissements de terrain, il faudrait trois jours pour l’atteindre et non deux heures comme c’est le cas en temps normal, tout en restant dangereux. Sanjit et moi ne sommes pas équipés pour une telle aventure, donc malheureusement ce qui devait être un moment fort de mon voyage ne peut avoir lieu. Je suis extrêmement déçue, et j’ai passé le reste de la journée à ruminer cette déception, essayant de trouver des solutions sans succès pendant que Sanjit travaillait sur le tri des photos…