Lewou, 5 juillet 2010
Aujourd'hui, la blague Teke a été très mauvaise. Il y a dans chaque voyage une journée où tout se passe mal, c'était aujourd’hui, alors que c'était une des journées les plus importantes pour moi, et pour Desirey, le photographe que j'avais engagé, qui n'était là que 4 jours.
Tout a commencé par une visite de routine à la banque pour retirer de l'argent, au seul distributeur de la ville qui fonctionne. Ou pas. Du coup, j'ai voulu changer les quelques espèces qui me restaient. Heureusement que je m'étais levée très tôt pour ne pas compromettre le reste de la journée. Il m'a fallu une heure et demie pour changer 200 euros. Rien que l'opération de change (hors attente, mauvaise orientation au guichet, hors bêtise du stagiaire de l'accueil fils d'un important client de la banque) a pris une demi-heure. Compter 10 billets de 20 euros nécessite une vraie concentration...
Bref, ce n'était que le début.
J'avais engagé Jo, un jeune éco-guide qui m'avait été recommandé (et qui avait même reçu une formation d'éco-guide) pour nous emmener Desirey et moi à Ekouyi, petit village des Plateaux Bateke. J'avais bien vérifié auprès de lui que les véhicules étaient réservés, au moins à partir de Lekoni. Il me l'avait assuré plusieurs fois. Jusqu'à la ville de Lekoni, nous allions prendre un clando, taxi collectif. Il m'avait dit que tout était organisé, facile, et plus économique de cette manière. C'était très important que tout soit bien calé.
Nous quittons donc Franceville pour Lekoni, nous rapprochant de la frontière avec le Congo. Nous avons un peu attendu le départ du taxi collectif, mais globalement, rien de très surprenant. La surprise, c'était à l’arrivée. Pas de véhicule pour Ekouyi. Pourtant, notre chauffeur devait être le père de Jo, notre guide. Au bout d'une heure d'attente, nous lui avons demandé de trouver une autre solution. Il était midi, et comme le soir tombe très tôt, il faudrait quitter le village à 15h00 au plus tard, ce qui ne nous laissait déjà que peu de temps. Pour Jo, bon africain, il fallait juste attendre, et quelque chose allait se passer. Problème, Desirey repart demain et nous ne pouvions décaler. Moi j'aurais bien dormi sur place si besoin mais Desirey ne pouvait pas. Il nous a fallu deux heures de plus pour trouver un véhicule, j'étais très très énervée. Je sais que cela ne servait à rien, mais quand je paye un guide pour organiser la journée, que je paye un photographe qui n'est là que 4 jours, j'ai envie d'autre chose que d'attendre 3 heures dans un boui-boui de bord de route. A 14h00, nous partons enfin, et nous avons pu admirer les magnifiques plateaux Bateke. J'aurais préféré attendre trois heures dans ce décor impressionnant. Malheureusement, il était déjà trop tard pour s'y arrêter. Mais là, petit coup de "chance", le véhicule est tombé en panne, et nous avons eu 10 minutes pour profiter du panorama ! La route sablonneuse ne ménage pas les véhicules, ni les passagers d'ailleurs. Nous avons dû renoncer à aller à Ekouyi, il était trop tard, et nous nous sommes arrêtés à Lewou, le village le plus proche, mais où les femmes n'étaient pas prévenues de notre arrivée. Nous avons aussi dû renoncer à la préparation du plat de nkumu. Nous avions juste une vingtaine de minutes au village, il fallait donc optimiser. Nous avons vu la récolte, beaucoup moins durable cette fois-ci puisque la racine de la plante est arrachée. Dans l'immensité des plateaux, ces petits coins de forêt sont parsemés, et pourtant remplis de nkumu. Les villages sont disséminés de la même manière, et les villageois plantent du manioc pour compléter.
Les chauffeurs du pick-up ont insisté pour que nous repartions, pour ne pas être surpris par la nuit en cas de panne. Il était déjà 16h00, et même si nous n'avions passé que quelques minutes au village au lieu de quelques heures, pas le temps de s'attarder.
Arrivés à Lekoni, le même chauffeur qu'à l'aller devait nous retrouver pour le retour à Franceville. Comme il commençait à faire nuit, il a monté son tarif, à 15000 francs. On lui a fait remarquer que ce n'était pas correct, mais en l'absence d'autre solution, que c'était ok. Et il ne voulait plus, entre-temps il avait commencé à boire et draguer une fille. Nous avons cherché un autre véhicule, de toute façon avec ce qu'il avait bu, hors de question que l'on monte avec lui. Autre chauffeur, tarif à 20 000 (pour un trajet normalement à 2000 par personne, soit 6000 en tout…). On a fini par dire ok, et au moment de prendre de l'essence, il a demandé 25000. A ce stade, j'étais vraiment trop énervée, fatiguée de ces personnes qui essayent de profiter un maximum parce que je suis blanche et censée tout payer plusieurs fois le prix normal, énervée par ce manque de parole et énervée contre le guide incapable de gérer une seule situation depuis le matin. Le budget transport de la journée devait être de 20 000 francs (soit 30 euros), j'en aurais eu en tout pour 100 euros. J'ai donc dit à notre chauffeur qu'il était malhonnête, et j'ai vraiment pesé mes mots, qu'on ne pouvait pas augmenter le tarif tous les kilomètres. Et du coup il a décidé qu'il serait lui aussi plus tranquille à boire sa bière, et il nous a laissés en plan. Nous avons retrouvé une voiture deux heures plus tard pour quitter Lekoni, et même si j'étais épuisée, je préfère avoir un chauffeur honnête et aimable qui fasse attention à la route en conduisant.
Franchement, quel calvaire tout ca pour même pas une demi-heure au village. Heureusement qu'il y avait les magnifiques Plateaux Bateke !