Les menaces

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Dans de nombreuses régions des forêts tropicales, les besoins alimentaires quotidiens sont souvent satisfaits par la forêt. Les produits végétaux, comme le Nkumu, contribuent à la sécurité alimentaire des populations. Et pourtant, des villageois qui autrefois cueillaient ce légume-feuille dans les forêts bordant leur village doivent maintenant faire des kilomètres pour en trouver, ou l'acheter au marché. La plante se raréfie dans toute l'Afrique Centrale. Quelles sont donc les menaces qui pèsent sur le Nkumu ?

D'une part, les méthodes de cueillette sont pointées du doigt. Pour faire les paquets qui seront ensuite vendus, les récolteurs ne se contentent pas des feuilles mais tirent toute la liane, souvent en arrachant la racine. Et ce déracinement contribue à la disparition progressive de l'espèce, puisqu'elle ne peut pas se régénérer au même rythme qu'elle est exploitée. Parfois, ils coupent aussi le support, l'arbre, pour pouvoir tirer toute la liane au maximum.
De plus, les jeunes feuilles, les feuilles assimilatrices qui permettent la croissance de la plante, se vendent bien sur les marchés, et sont donc récoltées en priorité alors qu'il serait bien justement de faire l'inverse...

D'ailleurs, le problème viendrait surtout des personnes qui récoltent le Nkumu pour en faire le commerce, surtout quand elles viennent de la ville, et qu'elles reviennent dans les villages. D'après certains témoignages, au sein des communautés villageoises, les cueilleuses alternent les lieux de récolte afin de laisser à la liane le temps de repousser, tout au long de l'année il y a une sorte de gestion naturelle des zones de cueillette. Mais lorsque les personnes viennent de la ville, elles cueillent le Nkumu là où elles le trouvent, sans respecter cette "gestion villageoise". C'est ainsi que petit à petit, le Nkumu ne peut pas se régénérer entre deux cueillettes, il disparaît et il faut le chercher de plus en plus loin. Il en va de même lorsque le Nkumu est récolté pour être vendu, car alors les quantités récoltées sont bien supérieures à la consommation habituelle des familles.

Il n'y a actuellement aucune consigne sur les méthodes de récolte "durable", et aucune réglementation, même dans les Parcs Nationaux (au Gabon, une large partie du pays est classée en Parcs Nationaux)ou dans les concessions forestières dites "sous développement durable". Cette dénomination concerne uniquement le bois et les méthodes d'exploitation du bois, et non les PFNL (Produits Forestiers Non Ligneux*). Et les concessionnaires forestiers n'ont aucun moyen de garantir que, hormis le bois, les produits de la forêt soient récoltés avec des méthodes garantissant la régénération des espèces.

Le Gnetum est une plante spontanée, sauvage. Il n'est pas cultivé actuellement, mais on assiste à une exploitation massive des populations naturelles restantes, qui ont presque disparu au Nigeria et deviennent rares au Cameroun, dans les deux Congos, au Gabon et en Centrafrique.

Si la majeure partie du Nkumu est consommée localement, les échanges commerciaux s'intensifient depuis quelques années. Des études (Chevalier, 1951) montrent que le commerce des feuilles de Gnetum se pratiquait déjà dans les années 1950 sur les marchés d'Afrique Centrale. Aujourd'hui, ce sont les échanges internationaux qui expliquent en grande partie la surexploitation du Nkumu. C'est un produit qui se vend bien, une source non négligeable de revenus dans l'économie familiale. Pour certains villageois, c'est ce qui va permettre d'envoyer les enfants à l'école. Alors puisque la demande existe, il faut la satisfaire, peu importe le coût écologique !

Certains rapports indiquent que le Nigéria importe massivement le Gnetum venu tout d’abord du Cameroun, puis de Centrafrique et du Gabon, puis que la Nigéria exporte vers l'Europe et les Etats-Unis pour satisfaire la demande des communautés africaines installées dans ces pays. Mais il y a une certaine confusion, puisqu'en France notamment, mais dans les autres pays européens, le Gnetum vendu proviendrait du Congo et du Cameroun. Localement, au Gabon, il a été difficile d'obtenir de l'information : dans la région du Haut Ogooué, à Franceville, les vendeurs pensent que beaucoup de Nkumu vient du Congo voisin. D'autres disent que le Gabon exporte son Nkumu vers le Congo. Il y a sans doute du vrai dans chaque affirmation, mais aucune allégation ne peut être certifiée sans une étude plus poussée.

C'est d'ailleurs le seul point sur lequel les avis se rejoignent : il y a un grand manque de données sur ce commerce informel, sur la valeur et le volume commercialisés et échangés des feuilles de Nkumu.
Sans ces données et sans pouvoir faire un état des lieux de la situation, comment l'améliorer ?

Le manque d'information est un problème global sur cette plante. Le Professeur Mialoundama, un chercheur qui a beaucoup travaillé sur le sujet, a regretté que la biologie traitant du cycle de vie, de la germination et de la reproduction d'une façon générale du Gnetum ait bénéficié de peu de travaux.
Jusqu'à présent, il n'y avait pas vraiment de coordination entre tous les chercheurs de la sous-région qui travaillent sur le sujet. Les efforts sont dispersés et du coup, il n'a pas encore été possible de mettre en commun toutes les avancées individuelles sur la compréhension de cette plante à tous les niveaux : botanique, sociologique, économique.

Par ailleurs, pour les budgets de recherche et d'action, que ce soit pour les chercheurs, les administratifs ou les ONG, le Nkumu, plante menacée à moyen ou long terme, est en "concurrence" avec des espèces animales ou végétales emblématiques, menacées elles à court terme, et qui demandent des efforts conséquents maintenant !

Mais l'intérêt croissant pour les PFNL (Produits Forestiers Non Ligneux*) porte la promesse qu'il n'y ait plus une telle concurrence mais que ces sujets soient traités conjointement. Il existe des solutions faciles à mettre en place, et d'autres qui demanderont en effet du temps et des moyens, pour commencer à préserver cette plante garante d'une certaine sécurité alimentaire !

* PFNL : tous les biens et services, différents du bois d'oeuvre et ses dérivés, fournis par la forêt ou d'autres écosystèmes ayant des fonctions similaires tels que les jardins de case, les vergers villageois et d'autres systèmes agroforestiers.

Sources :
- enquête de terrain juin-juillet 2010
- Schippers, R.R. & Besong, M.T., 2004. Gnetum africanum Welw. [Internet] Fiche de Protabase. Grubben, G.J.H. & Denton, O.A. (Editeurs). PROTA (Plant Resources of Tropical Africa / Ressources végétales de l’Afrique tropicale), Wageningen, Pays Bas.
- "Le koko ou mfumbu", sous la direction de F Mialoundama, édition l’Harmattan, collection Etudes Africaines

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